Soulages et l’art lointain chinois

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112 pages, 17 x 24 cm, broché, coutures apparentes.

Pierre Soulages a toujours manifesté de la curiosité, pour les arts venus d’ailleurs, ces « arts lointains » qu’il s’agisse de l’art préhistorique d’Altamira, de Pech-Merle, des scènes de Lascaux, des peintures de la Grotte Chauvet, de l’art roman et des arts médiévaux, ou encore plus largement des Amériques, africains, asiatiques, océaniens. Il aime contempler ces productions artistiques, les méditer, dialoguer avec elles. Pour lui, « l’art véritable n’a ni frontière ni temporalité ».

L’œuvre de Pierre Soulages, a déjà été associée à l’art africain ou examinée dans ses parentés artistiques avec l’esthétique et l’architecture cisterciennes. Mais étonnamment, cette œuvre n’a guère été envisagée dans ses rapports avec l’art chinois ancien.

L’auteur Bruno Duborgel a voulu, par cette publication interroger les possibles confrontation et dialogue entre tels et tels caractères, esthétiques advenus au fil de l’œuvre de Pierre Soulages et, dans le l’histoire de la peinture chinoise ancienne correspondant principalement à la peinture dite « lettrée ».

Ces deux univers artistiques n’auraient-ils rien à se dire au sujet, notamment, de l’espace architectural et de la correspondance des éléments dans la calligraphie ? Des relations du noir et du blanc et du couple formé par ces deux couleurs ? Du binôme associant le vide et le plein ? Du noir comme couleur d’origine, et de sa palette chromatique ? Du « mystère » du monde, du « sens » et de l’« inconnu » ? Autant de questions que ce texte aborde complété par une vaste iconographie.

 

Sommaire

p.5 — Ouverture
p.8 — Des formes-forces d’une écriture-architecture
p.18 — Du noir, du blanc, du lavis et de la transparence
p. 42 — D’un art chevillé au monde, et d’un triple refus esthétique
p.49 — Du haut et du bas d’un « paysage total »
p. 62 — Du « paysage total » de la peinture
p. 69 — De l’art, du noir, de la lumière et du phénomène de la « transformation »
p. 97 — Du souffle et de la lumière
p. 102 — De l’art hanté par le « mystère du monde »
p.105 — Finale. Comme un bruissement de résonances entre les parallèles

 

Extrait (pp. 6 et 7)

L’œuvre de Pierre Soulages, associée par Léopold Sédar Senghor à l’art « négro-africain », ou replacée ponctuellement dans le cadre des rapports d’empathie de l’artiste avec le Japon, ou examinée en profondeur par Georges Duby dans ses parentés artistiques importantes avec l’esthétique et l’architecture cisterciennes, n’a cependant, étonnamment, guère été interrogée dans ses rapports avec l’art chinois ancien. Ce dialogue s’est limité à quelques commentaires -nous y reviendrons- évoquant d’éventuelles et ponctuelles ressemblances formelles entre la calligraphie chinoise et certaines des premières œuvres de Pierre Soulages. Aussi nous a-t-il paru nécessaire, et possible, d’interroger et de préciser plusieurs niveaux de confrontation et de dialogue entre tels et tels caractères, esthétiques et autres, majeurs advenus d’une part au fil de l’œuvre de Soulages et, d’autre part, dans le vaste devenir de la peinture chinoise correspondant principalement à la peinture dite « lettrée » (wenrenhua : peinture, hua, de l’homme, ren, de culture, wen). Celle-ci est institutionnalisée et théorisée au XVIIe siècle, sous les Ming, mais elle s’annonce dès les VIIIe-IXe siècles, sous les Tang, se développe entre les Xe et XIIe siècles avec les Song et connaît un grand essor sous les Song et les Yuan (Xe-XVIe siècle), puis les Ming. Elle se définit principalement par la forte valorisation de la calligraphie et par la peinture de paysage -qui atteint des sommets entre le Xe et le XVIe siècle-, par la prédilection accordée à la peinture à l’encre, au lavis d’encre, à la monochromie -préférés déjà, dès les Tang, à la couleur- et par la profonde exigence d’exprimer le principe fondamental de l’animation du monde, en cohérence avec les énoncés du taoïsme. Une telle peinture, au-delà des apparences premières de sa vigoureuse altérité, ne présenterait-elle pas quelques accointances et niveaux de solidarité insoupçonnés avec l’art de Pierre Soulages ? Ces deux univers artistiques n’auraient-ils rien à se dire au sujet, notamment, de l’espace architectural et de la synchronicité des éléments dans la calligraphie ? Des relations du noir et du blanc, du couple formé par ces deux couleurs ? Du binôme associant le vide et le plein ? Du noir comme couleur d’origine, et de sa palette chromatique ? Du refus de la ressemblance ordinaire, du réalisme vulgaire, de l’esthétique mimétique asservie ? Du refus, en art, du pur formalisme, et de la recherche de consonances avec le monde ? Du binôme fondamental haut-bas ? De l’exigence d’un dépassement des limites, du « local », au profit d’une « image » de la totalité ? Des manifestations de la « transformation » -passage du couvrir au découvrir, du montrer au cacher, de la présence à l’absence, de l’apparition à la disparition, de la ténèbre à la lumière, etc., et inversement ? Des rapports du souffle, du vent et de la lumière ? Du mystère du monde, de l’innommé, du sens et de l’inconnu… ?

 

Auteur(s) : Duborgel, Bruno
Éditeur : Bernard Chauveau édition, Paris.. Parution : 01/09/2022
ISBN: 978-2-36306-309-0